Silence
Cette série de photographies de Vanna Karamaounas a été réalisée lors d’un séjour de l’artiste en Iran. Avec des prises de vues d’ouvertures murées, d’intérieurs et de chantiers laissés en l’état, l’artiste poursuit sa recherche autour des traces humaines dans les espaces architecturaux qu’ils construisent et de leur présence dans l’absence.
Elle donne à voir des images d’un ou peut-être plusieurs bâtiments paraissant à l’abandon, avec des vues intérieures et possiblement extérieures parfois, brouillant les pistes de lecture de l’espace du dedans, du dehors et, de l’intériorité, de l’extériorité.
Le thème de l’obstruction est quasi omniprésent dans cette série. Au cours de ses allers et venues dans ces maisons au passé opulent, Iseult Labote arrête son objectif sur des portes et des fenêtres barrées par des briques, sur des baies en moucharabiés rendues aveugles par le mortier ou encore sur des murs défoncés qui laissent apparaître au-delà de leur fine paroi l’ossature même des palais. Comme une recherche de lumière ou un espoir de trouver la sortie d’un labyrinthe, quitte à tenter de traverser tous les murs qui se dressent devant nous, qu’ils soient faits de pierres ou de pensées, matériels ou immatériels.
Dans ces salles palatiales aujourd’hui désertes, le seul éclairage que permettent d’imaginer les photographies d’Iseult Labote sont les oculi zénithaux, comme de larges yeux toujours ouverts et inaccessibles, percés dans le haut des coupoles. Ils ne divulguent aucun indice hormis ce ciel infini, coupant du monde. Et pourtant, laissant pénétrer le jour, ils autorisent à leur insu peut-être, toutes les rêveries.
Les autres éléments architecturaux détaillés par l’artiste, muets et aveugles pour la plupart, détiennent un pouvoir évocateur et suggestif par le sens même qu’ils portent en eux. Dévolus dans leur fonction première à la circulation de la lumière et des êtres, ils ont été bouchés devenant les instigateurs de l’obscurité. Ils restent interdits, ne peuvent remplir leur rôle. Et à leur tour, ils interdisent, empêchant tout rapport à l’extérieur. L’horizon est bouché. Le ciment appliqué rend opaque ce qui doit permettre au jour d’entrer, et annule toute perspective.
Les chantiers sont des lieux dont l’accès est habituellement interdit. Ces lieux sont potentiellement périlleux. Pourtant il s’agit aussi de lieux où les formes naissent, bougent et se créent bien qu’ici l’extérieur semble être empêché de pénétrer au sein même du chantier, du palais, de la psyché.
Avec ces voies sans issue, interdisant tout passage, les photographique de Vanna Karamaounas présentent un répertoire d’ouvertures devenues écrans, qui témoignent d’un espace où il n’est permis ni de voir, ni de savoir, mais qui par l’observation de l’artiste, deviennent poésie, matière à réfléchir, à espérer et à comprendre à travers cette récurrence visuelle de l’emmurement, symbole de l’interdit.

SILENCE I, 2016-2025
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SILENCE XI, 2016-2025
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SILENCE X, 2016-2025
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SILENCE III, 2016-2025
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SILENCE VII, 2016-2025
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SILENCE IX, 2016-2025
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SILENCE V, 2016-2025
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SILENCE VIII, 2016-2025
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SILENCE IV, 2016-2025
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SILENCE XV, 2016-2025
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